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jeudi 14 juin 2001
Analyses simplistes, désinformation et discours sécuritaire

Une association vertueuse pour la promotion de l’aveuglement moraliste

par Cracounette
 

Une récente dépêche nous apprend
l’arrivée en fanfare d’une nouvelle organisation de lutte contre le racisme.
Celle-ci cependant n’officie que sur le Net et utilise des méthodes quelque peu
étranges, quoique déjà vues : elle a en effet annoncé son intention d’assigner en justice
seize fournisseurs d’accès en vue d’obtenir l’interdiction de l’accès à un portail
néo-nazi américain.

Cette association s’appelle « J’accuse... Association Internationale
Pour la Justice » (sic).
On sera peu surpris de constater qu’elle est
présidée par Marc Knobel, membre de la Licra, et a pour avocat Stéphane
Lilti, également avocat de l’UEJF ; les deux mêmes
personnes avaient piloté les
attaques judiciaires de l’UEJF et de la Licra contre divers fournisseurs
d’hébergement. La rhétorique employée pour stigmatiser les partisans
de la liberté d’expression avait alors été particulièrement méprisante et
approximative : au mieux
les assimiler au courant ultra-libéral, au pire les accuser de favoriser
sans scrupule l’expansion du racisme et du fascisme. Ceci, bien que parmi
les détracteurs de ces actions en justice se trouvassent des organisations
aussi peu ultra-libérales et aussi peu néo-fascistes que, par exemple,
le Réseau Voltaire ou Reporters Sans Frontières.

On découvrira également qu’un autre membre du bureau de l’AIPJ est Antoine Peillon, co-signataire
d’une des tribunes de Marc Knobel dans Libération.
Un éclairant
article de Thomas Lemahieu,
par ailleurs journaliste à l’Humanité,
a analysé les options idéologiques développées par Antoine Peillon dans ses
diverses interventions.

Une visite du site Web de l’AIPJ se révèle édifiante.
La page d’accueil situe d’emblée la rhétorique de l’association : elle opère non dans le
domaine rationnel, mais celui
des sentiments inévitablement suscités par l’évocation d’une
cause juste et légitime.
Ainsi le cadre principal
s’ouvre-t-il sur une photo de déportés à Auschwitz (dont on apprend qu’elle
fut prise
juste avant qu’ils fussent gazés), pour se terminer par un lien vers le
« J’accuse »
d’Emile Zola... A titre de comparaison, ni le site
du MRAP,
ni celui de la Licra, associations reconnues de lutte
contre le racisme, ne ressentent le besoin ou le désir
d’une telle évocation émotionnelle pour justifier de leurs combats - même si la présentation
du site de la Licra,
qui fait clignoter à toute vitesse les mots « citoyenneté », « Auschwitz », « génocide »,
« assimilation » et tant d’autres dans une hideuse animation flash,
laisse un goût étrange.

Au fil de ses communiqués courroucés et de ses analyses à l’emporte-pièce,
l’argumentaire de l’AIPJ reprend l’éternel et fallacieux argument
du non-droit. Il est certes démagogique mais inutile de prétendre vouloir,
comme le fait l’AIPJ dans son message sur le forum du FDI,
que « l’internet, comme tout autre média, [s’inscrive] dans le cadre général du droit
sur la liberté de la presse (loi de 1881) et des autres dispositifs légaux [...] ».
Faut-il réellement expliquer que l’Internet n’est pas hors-la-loi ?
Il s’inscrit de
façon tout à fait naturelle dans le cadre légal français, et il semble que la
longue litanie de procès intentés à des auteurs de sites Web et
des fournisseurs de services devrait suffire à le prouver (parfois de façon
singulièrement inquiétante comme dans les récentes affaires de
détournement de marques - voir dernièrement
Aubade).

La page de liens en catégorie « information » figure encore une fois
clairement les options idéologiques de l’association. On y retrouve
les articles et interviews de Marc Knobel (dont les tribunes parues
dans libération), quelques autres textes de presse
stigmatisant Internet comme vecteur de haine et jusqu’à l’atroce éditorial
de Philippe Val
(« Internet,
la Kommandantur libérale »).
Par contre, il n’y a évidemment nulle trace des textes qui
faisaient, même directement, réponse au
tapage médiatique de Marc Knobel.

Enfin, on remarquera que l’analyse du Forum sur les Droits de l’Internet
fournie par l’AIPJ
est conclue de façon particulièrement hypocrite. Se félicitant
du refus d’IRIS de participer au FDI, et extrayant de son contexte une phrase du
communiqué d’IRIS à ce sujet, l’AIPJ prétend prouver par la citation
l’accord des deux associations sur le sujet. Or,
IRIS est opposée, non seulement au FDI, mais aussi et non plus mollement
à l’idéologie répressive et sécuritaire de l’AIPJ et des membres de son bureau.
L’arsenal habituel de la manipulation intellectuelle et morale se retrouve
ailleurs.
Comme dans la préface de Philippe Breton (autre membre de l’AIPJ)
à « Pour en finir avec les cybermarchands de haine »,
texte rédigé par Marc Knobel et Antoine Peillon.
On y apprend « la diffusion artisanale mais massive [...] de jeux vidéo
propageant, auprès de la jeunesse, ce genre
d’idéologie. Des dizaines, voire des centaines de jeux, sur le modèle du « test aryen », « clean Germany »
ou « KZ-manager », ont circulé parmi la jeunesse autrichienne, allemande, puis dans tous les pays
occidentaux ». Evidemment, pratiquement personne n’a vu à l’époque passer les dits jeux
(en connaissez-vous ?) -
et en fait de diffusion massive, il s’est probablement agi de quelques dizaines ou
centaines de
copies. Plus loin, Philippe Breton continue sur sa lancée avec l’habituelle
inversion logique
qui consiste à prétendre que réprimer toute expression du racisme
éliminera le racisme lui-même...

Nonobstant et paradoxalement, la création de cette nouvelle association est
une possible bonne nouvelle. Cela signifie en effet peut-être que
les associations antiracistes reconnues (Licra, MRAP entre autres)
prennent conscience du fonctionnement de l’Internet
et de la richesse du potentiel démocratique et citoyen qui le sous-tend,
et qu’elles ne prêtent plus une aussi grande
attention au discours ultra-sécuritaire de ceux qui les entraînèrent
dans la série d’actions qui trouvèrent leur paroxysme délirant dans
l’ultra-médiatisée affaire Yahoo [1].
Ce qui expliquerait que les susdits partisans d’une législation anti-démocratique soient
aujourd’hui obligés de créer leur propre plateforme pour continuer à propager
leurs idées.

 

[1Sur l’attitude passée des associations antiracistes et leurs graves erreurs
d’appréciation vis-à-vis d’Internet, on pourra lire le caustique
« Petit historique des procès antifachos » dressé par Arno.

 
 
Cracounette
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> Oui, mais que proposez-vous ?
30 septembre 2001, message de Emmanuel
 

Bonjour...

Bravo pour votre critique des organismes de censure moralisatrice. Mais que proposez-vous ?
Faut-il que tout individu et groupe puisse exprimer ce qu’il désire, sans lois ni restriction ?
Il existe déjà des lois restreignant la liberté de l’écrit, par des délits flous tels que "incitation à la haine raciale, religieuse"... Ce sont ces lois qui me semblent dangereuses.
Si vous les admettez, vous êtes entraînés jusqu’à des dérives telles que celles que vous citez, et bien d’autres... A terme, c’est n’importe quelle critique contre un organisme qui sera considérée comme une "incitation à la haine" et pourra entraîner la répression pénale !
Si vous voulez échapper à ce piège, il faut non seulement lutter contre les associations liberticides, mais aussi aller en amont, jusqu’aux lois qui déjà donnent une légalité certaine aux visées de ces associations !

Répondre


> Une association vertueuse pour la promotion de l’a
29 juin 2001, message de Martin Nourmy
 

"Ainsi le cadre principal s’ouvre-t-il sur une photo de déportés à Auschwitz (dont on apprend qu’elle fut prise juste avant qu’ils fussent gazés), pour se terminer par un lien vers le « J’accuse » d’Emile Zola..."

Les auteurs du site "J’accuse" ont, depuis la campagne de lancement, remplacé l’image d’Auschwitz par un extrait du manuscrit de Zola. Reculade ? Ont-ils pris conscience de l’hénaurmité de leurs tentatives de rameuter frénétiquement et Zola et les 6 millions de victimes de la Shoah dans leur combat dérisoire contre les hébergeurs ?

Répondre


Qui manipule qui dans cette histoire ?
15 juin 2001, message de Peeff
 

Bonjour,

On aurait souhaité que ce texte manifestement rédigé à la hâte soit un peu plus nuancé dans ses analyses.

1/ on ne peut bien sûr que regretter le soutien de cette association au principe de la responsabilisation des intermédaires techniques et aux "fameuses diligences appropriées" qui ouvrent pourtant la boîte de pandore à tous les abus en matière de limitation de la liberté d’expression, comme on a déjà pu le vérifier à travers notamment les péripéties électroniques de l’affaire Danone.

2/ Par contre, votre dénonciation de l’utilisation par l’AIPJ de L’arsenal habituel de la manipulation intellectuelle et morale me paraît pour le moins excessive :

2.1/ Je ne vois pas en quoi la citation du CP d’IRIS au sujet du FDI est répréhensible, dans la mesure ou les deux associations sont manifestement d’accord pour nier toute légitimité ce forum.
Dautant plus que, contrairement à ce que vous insinuez, à aucun moment l’AiPJ ne sous-entend qu’IRIS cautionne sa position au sujet de la responsabilité des intermédiaires techniques. Ce qu,i en soi, n’a rien d’étonnant puisque IRIS s’y oppose farouchement.

2.2/ Enfin, vous affirmez que Philippe breton exagère fortement dans sa préface du rapport sur "Les cybermarchands de la haine" un problème qui n’aurait à vos yeux aucun"caractère massif" sans que vous apportiez le moindre indice corroborant votre hypothèse. C’est d’autant plus regrettable que Breton s’appuie quant à lui sur un certain nombre de données chffrées extraite du rapport susmentionné.

Passons sur les extrapolations du dernier paragraphe pour aboutir directement à une interrogation : je me demande au bout du compte si votre reproche concernant l’utilisation par l’AJPI d’utiliser tout L’arsenal habituel de la manipulation intellectuelle et morale ne devrait pas plutôt s’adresser à vous en raison des nombreuses insinuations douteuses et/ ou non fondées contenues dans votre texte.

PF.

Répondre
> Qui manipule qui dans cette histoire ?, 15 juin 2001

Bonjour Peeff,

[...] un problème qui
n’aurait à vos yeux aucun"caractère massif" sans que vous apportiez le
moindre indice corroborant votre hypothèse. C’est d’autant plus regrettable
que Breton s’appuie quant à lui sur un certain nombre de données chffrées
extraite du rapport susmentionné.

Que lis-je donc dans le rapport susmentionné ? :

- A l’époque, un écolier sur cinq reconnaîtra avoir joué avec ce type de jeux et une enquête effectuée à
Linz montrera que 39 % des élèves connaissent, échangent et utilisent les disquettes.
 : un écolier sur cinq  ?
Le rapport ne précise pas l’échantillon statistique ! Que peut-on donc tirer de ce chiffre
dénué de signification concrète ? Quant aux 39%, il s’agit d’un chiffre pour une école primaire :
quelle pertinence peut-on lui donner dans une analyse globale ?

- En Allemagne, la directrice du
Bureau de contrôle des écrits interdits à la jeunesse, recensera plus de 120 versions différentes
... qu’est-ce qu’une
version ? On ne le précise pas. En tout cas, on ne parle pas de jeux différents. Or à l’époque, la majorité des ordinateurs utilisés par les jeux étaient
des Atari et des Amiga (le PC n’existait que très peu dans les foyers). Ordinateurs sur lesquels proliférait le piratage ;
n’importe quel utilisateur amateur de jeux avait
plusieurs centaines de jeux piratés chez lui, et le phénomène était tel que beaucoup ignoraient ce qui était
présent sur une grande partie de leurs disquettes : elles étaient copiées en masse, sans discernement et sans même toujours
les utiliser après... Dans ce contexte, une version peut tout aussi bien signifier un jeu identique, mais
au début duquel a été insérée une intro (c’est le terme utilisé) d’un groupe de crackers (pirates) différents.
Si la directrice du bureau de contrôle des écrits interdits à la jeunesse n’était pas plus au fait de la micro-informatique
que ne le sont aujourd’hui la plupart des bureaucrates de l’Internet, il y a fort à parier que les différences
qu’elles aient recensées comprennent ce genre de détails.

D’ailleurs, les différents chiffres sont contradictoires : on parle à un moment de "plus de 120 versions" de jeux diffusés principalement
"en dehors de tout circuit commercial". Puis est avancé le chiffre de "6000" jeux "parmi les 20 000 jeux vidéo disponibles
en juin 1989 sur le marché allemand". Quel marché exactement, si les jeux sont
diffusés "en dehors de tout circuit commercial" ? De plus la proportion de
ce dernier dénombremement (un tiers)
est tout de même hallucinante. Ayant moi-même touché
à l’informatique à cette époque, je peux vous affirmer que jamais je n’ai vu passer, ni chez moi ni chez un quelconque
ami (et je connaissais quelques "collectionneurs"), la moindre copie d’un jeu néo-nazi ou raciste ou antisémite. Certes, je n’étais
pas en Allemagne mais en France. Cependant, les infos que j’avais d’Allemagne (par
quelques correspondants, et par la lecture de disczines, les webzines de l’époque)
n’ont jamais, à mon souvenir, fait allusion à une quelconque déferlante de jeux
néo-nazis - bien que la lutte contre le néo-nazisme fût un sujet sensible.

De plus, si la distribution des jeux échappait à tout circuit traditionnel comme le signale ou prétend l’article, on ne voit pas
non plus pourquoi elle n’aurait pas passé les frontières, et ne se serait retrouvée
en France (surtout vu le mode de reproduction : copie massive de disquettes sans même
savoir ni trier ce qu’elles contiennent...). Le chiffre de 6000 sur 20000 est tellement invraisemblable
qu’il fait penser à toutes les estimations hasardeuses du nombre de sites néonazis (ou pédophiles) avancées de-ci de-là
pour essayer de donner corps à la paranoïa inspiratrice des réactions sécuritaires.

La Reppublica a sorti, d’après le rapport, le chiffre "6000 sur 20000"
en 1989 qui reçoit aujourd’hui la confiance des auteurs du rapport. Il y a quelques
mois, Val allégait, en recevant toute la confiance des non-internautes
(y compris parmi ses confrères, y compris parmi les membres de l’AIPJ
dont le site reproduit cet article en lien à la rubrique "informations" !),
que l’Internet était le repaire exclusif
des tarés, des pédophiles et des néo-nazis. En l’absence de
confirmation scientifique (une rumeur journalistique
ne me satisfait pas et vous avez des arguments concrets plus haut),
pourquoi croirais-je plus La Reppublica d’il y a dix ans
que le Philippe Val d’aujourd’hui ? Or le rapport ne cite pas de
sources scientifiques, et ne donne aucune URL sur le sujet
(peut-être n’y en a-t-il pas). Il peut donc tout
aussi bien s’agir d’un article racoleur
et infondé comme il y en eut, y compris dans des médias "respectables",
à propos du "Net néo-nazi", du "Net pédophile", etc.
Or à l’époque, la
préoccupation vis-à-vis des "valeurs" véhiculées par les jeux était
assez forte, comme pour le Net aujourd’hui. Je me souviens
ainsi d’un numéro du magazine "Micro Mag" (je peux peut-être retrouver
les références à l’occasion)
qui faisait un soi-disant dossier, bien vide en réalité, sur le racisme, le sexe,
la violence
et le piratage dans les jeux video ; le sujet était en effet relativement
médiatique.
Quelques temps plus tard, le même type d’hystérie allait donner la mention
obligatoire, sur les boîtes des jeux, sur le danger de crises d’épilepsie :
faculté des médias à monter en épingle un artefact statistiquement
insignifiant (on remarquera aujourd’hui que les dites crises sont
globalement inexistantes, que ce soit médiatiquement ou dans les
informations que chacun reçoit de ses proches - alors même que
l’utilisation des jeux video s’est largement développée).

Enfin, quelle que soit la valeur des chiffres avancés, le rapport de
cette affaire avec l’Internet et les sites racistes est
extrêmement douteux, de l’ordre du sentimental. Nulle part n’est prouvée
scientifiquement (et pour cause) une hypothétique tendance des
techniques informatiques à provoquer l’expansion du fascisme,
qui serait une généralisation argumentées des enseignements de la soi-disant
déferlante fasciste dans les jeux vidéo.
Or la façon dont ces
faits sont cités en exergue (qu’on ne me dise pas que cet exemple
a été choisi par hasard !), sur un ton des plus dramatiques, avec force
détails macabres et chiffres
alarmistes, tend bien à vouloir susciter, via la transition injustifiée sur
Internet, une réaction révulsée du lecteur à l’idée que le Net a pour
conséquence lui aussi, d’inciter 22% des gens, voire des enfants de 7 ans,
de massacrer virtuellement des Juifs...

Le rapport cite les chiffres du centre Simon
Wiesenthal sur le "nombre de sites racistes". Or, comment peut-on affirmer
qu’il y a eu exactement "1429" sites racistes sur le Web ? Qu’on dise qu’on en a trouvé
environ 1500
, ou entre un et deux mille, d’accord. Mais la précision
du chiffre avancé est ridicule, d’autant plus que la datation est vague.
De même lorsqu’on dit qu’il
n’y avait qu’un seul (un !) site raciste en 1995 ? Comment ne peut-on
pas mettre en doute une mesure à la pertinence si hasardeuse
(c’était probablement
plutôt que le centre Wiesenthal venait de commencer ses
recherches, et ne
maîtrisait pas encore vraiment l’outil). Au moindre oubli,
et les chances sont très grandes,
le taux d’erreur monte
à 100 %... Les auteurs auraient tout de même dû expurger une mesure aussi
douteuse ; ne l’ayant pas fait, ils nous conduisent à nous interroger sur
la rigueur de leur démarche.

De plus, l’"évolution" dont s’inquiètent les auteurs ne s’appuie sur aucun calcul
sérieux. En tenant compte des données plausibles (c’est-à-dire en éliminant le "1"
de 1995), la progression des sites racistes est-elle plus rapide, moins rapide, que celle
du nombre de sites dans son ensemble ? Le premier cas serait rassurant au contraire du sentiment
que les auteurs veulent susciter, mais on ne sait pas (ou on ne veut pas donner les chiffres).

A-t-on des chiffres ou tout du moins une
vague estimation sur la fréquentation de
ces sites dans leur ensemble (c’est bien ce qui
compte !), et non juste un ou deux ?
"Stormfront" cité par le rapport est une saloperie apparemment pas mal
visitée (les stats sont en libre accès). Je n’ai pas eu le courage
de chercher le deuxième site mentionné. Et les autres ?
Les statistiques de deux sites ne suffisent pas à
constituer une vision d’ensemble.

En résumé, on n’a aucune précision, aucune
indication, aucune relativisation statistique, rien que les
quatre chiffres implacablement martelés : un, puis 600, puis 1429, puis 2100.
Progression
inéluctable et effarante du racisme, interprète le lecteur scandalisé.

Les auteurs savent ou devraient savoir qu’ils manipulent un domaine
sensible, facilement générateur de sentimentalisme
et de réactions irrationnelles, et donc prendre
d’autant plus de précautions dans leurs analyses et
la façon dont ils les présentent.
Ils font exactement l’inverse. A dessein ou pas, le rapport
ne permet pas de conclure avec certitude (ce qui n’est
pas une excuse, d’ailleurs). Leurs précédents
écrits ne faisaient toutefois pas montre d’une grande honnêteté
intellectuelle (textes cités dans l’article).

Enfin, le rapport l’admet lui-même : "Le net n’a certes pas inventé la propagande. Le net n’est certes pour
rien [je souligne, NDC] dans la création de ces
mouvements et leur développement. D’autres paramètres permettent d’expliquer ce que sont ces
mouvements, les stratégies élaborées, les liens qu’ils entretiennent entre eux et l’impact qu’ils peuvent avoir.
Évidemment, on ne tombe pas automatiquement sur les pages web de Stormfront ou du Ku Klux Klan. Il
faut vouloir les trouver, à moins que vous ne tombiez sur des sites négationnistes trop souvent et facilement
référencés dans les moteurs de recherches." Alors ? Quel intérêt de vouloir
mettre à bas l’édifice des libertés mises en pratiques et en valeur par le Net ?

Bien à vous

Cracounette.

Répondre
> Qui manipule qui dans cette histoire ?, 15 juin 2001

Re-bonjour,

Je ne vois pas en quoi la citation du CP d’IRIS au sujet du FDI est
répréhensible, dans la mesure ou les deux associations sont manifestement
d’accord pour nier toute légitimité ce forum. Dautant plus que,
contrairement à ce que vous insinuez, à aucun moment l’AiPJ ne
sous-entend qu’IRIS cautionne sa position au sujet de la responsabilité des
intermédiaires techniques.

Le propre d’un sous-entendu est d’être... sous-entendu. Or, quand je lis le
paragraphe conclusif suivant :

"
Ironie du sort : cet appel du pied manifeste aux « internautes » n’a finalement pas obtenu le succès
politique escompté. Le 9 avril 2001, l’association Iris (Imaginons un réseau internet solidaire), sollicitée
par Isabelle Falque-Pierrotin pour représenter les « utilisateurs » au sein du conseil d’administration du
futur « Forum », a sèchement décliné l’invitation. Dans un communiqué acerbe, l’association donne les
motifs de ce refus. Ils valent d’être en partie cités : « Par cette décision, Iris réitère sa constante opposition
aux tentatives de capter le débat public et de substituer à la loi le concept flou de corégulation. (...) De la
même façon, Iris refuse de cautionner la véritable dérive de la loi vers le contrat que constitue la
corégulation, concept fondamental de la doctrine libérale qui met l’État sur le même plan que les acteurs
privés et qui organise officiellement leur lobbying... » On ne saurait dire mieux.
"

Je trouve personnellement à peu près clair que l’AIPJ reprend à son compte
le refus
d’Iris car celle-ci bénéficie d’une certaine renommée. Les motifs de désaccord,
profonds, sont totalement occultés (sans même mentionner leur existence
en tant que tels) pour ne laisser paraître que le sujet d’accord,
qui ne
se situe qu’à la base de la réflexion des deux associations (les libertés contre
le libéralisme, après quoi les idéologies divergent). Il s’agit bien sûr
d’une impression, mais si j’ai eu cette impression, il n’est
pas improbable que d’autres tombent dans le piège.
Et une telle appropriation de la renommée d’Iris est pour le moins
malhonnête pour les raisons que vous citez vous-mêmes.

C.

Répondre
> Qui manipule qui dans cette histoire ?, Peeff, 16 juin 2001

Bonjour C...

Tout d’abord, je tiens sincèrement à te remercier pour avoir pris le temps de répondre de manière
aussi fouillée à mes remarques.

Je suis tout à fait d’accord avec ton analyse des chiffres du rapport de l’AIPJ qui doivent être maniés
avec une très grande précaution en raison de leur imprécision et du manque de précision quant à leur
origine et la manière dont ils ont été obtenus.

Cela dit, je vous renvoie quand même dos à dos. Eux parlent de "déferlante" et toi que "
pratiquement personne n’a rien vu". Mais aucun ne dit qu’on ne dispose pas de données chiffrées
sérieuses sur le sujet. C’est amha pourtant cela que vous auriez dû mettre en avant dans votre article
sans attendre de répondre à mes remarques.

Au sujet de la citation d’IRIS, je ne suis par contre pas du tout convaincu par votre argumentation.
L’AIPJ est tout à fait légitimée à citer IRIS (je suis membre de l’asso) à l’appui de son argumentation
(et de s’appuyer sur la "très forte légitimité" de ladite asso) sur un point précis de son raisonnement
où les deux sont en accord sans évoquer pour autant les désaccords bien réels et profonds qui
peuvent en effet exister entre elles. De la même manière que n’importe quel auteur peut en citer un
autre sur un point précis de son argumentation tout en étant fondamentalement opposé au reste de
ses analyses sans avoir pour autant à se justifier sur ce point, et ce dans le but de renforcer la
légitimité de son propos.

De manière plus général, je ne te cache pas que c’est l’esprit même de ton article qui me déplait -même si je le trouve par ailleurs trèsh abile bien écrit :
pourquoi accuser l’AIJP - de manière très subjective au vu des arguments que tu avances - de
"manipuler l’info" alors que le vrai problème tient fondamentalement et objectivement à leur volonté
de responsabiliser les intermédiaires techniques ? En procédant de la sorte, tu fragilises ton
raisonnement alors que le motif principal de ta critiqe me paraît quant à lui tout à fait justifié.

enfin bon, ce que j’en dis...

Bien à toi, PF.

Répondre


> Tous les humains sont faillibles...
15 juin 2001, message de Socrate
 

Bonjour Cracounette

J’ajouterai à cet article juste et documenté, mais un poil inquisiteur, que la France
poussée par ses assos anti-racistes fait pression à
Bruxelles pour faire intégrer à la Convention Cybercriminalité, les sites néo-nazis, prenant une
fois de plus le risque de créer une sorte de jurisprudence internationale qui permettra
ensuite à la Chine
ou à l’Afghanistan par exemple de monter au créneau et d’obtenir la bénédiction des pays
libéraux pour censurer les sites de propagande démocratiques ou les sites de femmes non-voilées.

J’ajouterai aussi la position plus que paradoxale de la LDH face à la LSI. Sur le point de la respos,abilité des
inetrmédiaires techniques, elle juge insuffisantes les dispositions qui critiquent tous les autres acteurs
et demandent "la création d’une sanction spécifique" !

Je dirais également que l’aveuglement de Knobel et de J’’Accuse ne met pas en cause la justesse de
leur combat pour que l’horreur ne se reproduise pas, mais les méthodes
On me dit que Knobel est intelligent et tout dévoué à son combat. OK
Qu’il écoute ceux qui sont "sur le fond" ses alliés, et qu’il arrête de se faire mener en bateau
par des faux-amis qui ont eux à coeur d’imposer la censure au prix de la liberté de tous.
ceux là ne sont pas aveugles, ils sont sourds, et c’est pire.

Socrate

PS : Attention point Goldwin ;-)

Répondre
> Tous les humains sont faillibles..., 15 juin 2001

Cher Socrate,

Vous avez raison, l’article est un poil inquisiteur dans le ton et je pense
que c’est ce qui a fait tiquer Peeff, ci-dessus. Je suis aussi d’accord avec vos constructives remarques,
notamment à propos des tendances actuelles en matière de règlementation
européenne.

Bien à vous

Cracounette.

Répondre
> Tous les humains sont faillibles..., 17 juin 2001

B’jour, M’r Carcounette.

Je n’ai pas votre talent rhétorique ou votre culture. Je
ne puis donc faire qu’une réponse à mon petit niveau.

Arrêtons la langue de bois deux minutes, je vous prie.
Le véritable débat n’est pas celui de la liberté, mais de
l’impunité.

Personellement, je me moque de savoir qui soulève la question.
Pour naïve qu’elle soit, l’initiative que vous dénoncez n’a de
sens que du fait de la carence d’une réponse compatible avec
vos idéaux... ou me trompe-je ?

Vous prétendez que toute limitation de la liberté d’expression
est un préjudice aux générations futures : soit.

Lorsque la défense de ce principe a pour incidence d’accorder
de fait l’impunité aux microscopiques minorités fédérées
par la haine, dont le réseau démultiplie le pouvoir de nausance,
quelle réponse compatible avec vos principes suggérez-vous ?
Evidemment, vous pouvez répondre que ce constat est faux.

Le débat sur la co-régulation n’existe que parce que le constat
d’existence d’un conflit entre liberté et impunité est partagé.
La politique n’est que l’appropriation d’un constat à une cause.
L’économie n’est que l’appropriation de la politique à des fins privées.
Faites-vous autre chose ?

Répondre
> Tous les humains sont faillibles..., 17 juin 2001

Lorsque la défense de ce principe a pour incidence d’accorder de fait
l’impunité aux microscopiques minorités fédérées par la haine, dont le
réseau démultiplie le pouvoir de nausance, quelle réponse compatible
avec vos principes suggérez-vous ? Evidemment, vous pouvez répondre
que ce constat est faux.

1. Ce constat est discutable. La notion même d’impunité suggère qu’il y a crime ou
délit. Donc que l’expression d’une opinion peut constituer un délit. Il n’y a pas
consensus sur le sujet des délits d’opinion racistes et antisémites (Pierre Vidal-Naquet
est contre la loi Gayssot, par exemple).

2. Après avoir questionné l’impunité, et en admettant pour la forme
qu’on convient de celle-ci (donc qu’il y a des délits d’opinion),
il faut questionner les moyens utilisés. Les forces de police n’ont pas le droit à
toutes les violations des droits fondamentaux pour arrêter un criminel, fût-ce
un dangereux tueur en série ou un pédophile récidiviste (*). Devons-nous adopter
une attitude différente quand il s’agit de délits d’opinion, bien moins graves
que des crimes et délits matériels ? La seule chose qui puisse permettre de
répondre "oui" est une attitude sentimentaliste, certes peut-être tout à fait
indignée et tout à fait de bonne foi, mais dont vous ne nierez pas qu’elle est
très préoccupante.

(*) une note à ce propos : il y a quelques mois, les médias français rapportaient
la chasse aux pédophiles lancée en Angleterre, sous-entendant que les Anglais
étaient un peuple arriéré aux pratiques moyen-âgeuses. Soit. Mais que font ces mêmes
médias quand ils relaient de leur côte la paranoïa sécuritaire à propos de
l’expression raciste sur le Net ?

Répondre
> Tous les humains sont faillibles..., 17 juin 2001

> Devons-nous adopter une attitude différente quand
> il s’agit de délits d’opinion, bien moins graves que des
>crimes et délits matériels ? La seule chose qui puisse
> permettre de répondre "oui" est une attitude sentimentaliste

J’avoue que c’est ce point précis qui me pose le plus de
problèmes : il n’y a pas de délit d’opinion. L’existence ou
non de délits d’expression fait l’objet de consensus sociaux
locaux, hors-sujet ici.

Cependant, des concepts comme la protection de la dignité
humaine font l’objet de consensus internationaux, avec tout
le flou que cette définition implique.

Que répondre lorsque le réseau est le vecteur, voire le vivier
d’une atteinte à la dignité de la personne humaine (quelle que
soit la définition qu’on veuille donner à ce terme, éventuellement
différente de celle qui est proposée au début du débat).

Je pense que tant que cette question ne sera pas abordée, des
initiatives ne cesseront de voir le jour, et trouveront un
soutien croissant au fur et à mesure que le constat s’étend, et
trouveront toujours le soutien de tous les avocats de toutes
les formes de bien-pensée.

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> Tous les humains sont faillibles..., 17 juin 2001

Cependant, des concepts comme la protection de la dignité humaine
font l’objet de consensus internationaux, avec tout le flou que cette
définition implique.

Effectivement la notion devient très floue et controversée quand on ne
parle pas d’atteintes physiques, matérielles, véritables, mais d’expression
d’une opinion portant en germe une telle atteinte. Ainsi les associations
anti-racistes américaines sont-elles a priori aussi dignes de crédibilité
que leurs équivalentes françaises, et pourtant elles n’ont pas du tout
les mêmes recommandations vis-à-vis d’Internet et de l’expression raciste
en général.

Que répondre lorsque le réseau est le vecteur, voire le vivier d’une
atteinte à la dignité de la personne humaine.

Je ne voudrais pas répéter mes arguments à l’infini, mais l’idée de « vivier »
est fallacieuse. Antoine Peillon et Marc Knobel eux-mêmes l’admettent :
« Le net n’a certes pas inventé la
propagande. Le net n’est certes pour rien dans la
création de ces mouvements et leur développement. »
Je répète et je souligne : « Le net n’est certes pour rien dans la
création de ces mouvements et leur développement. »

Quoiqu’il en soit, nous sommes en train de dériver vers la question très
difficile de la
validité du délit d’expression et/ou d’opinion. C’est loin de la critique première
des actions de l’AIPJ, qui reposait avant tout sur la volonté de celle-ci de voir
les opérateurs techniques effectuer spontanément un travail de police hors de toute investigation
judiciaire. Indépendamment du fait que le délit soit fondé ou non.

Voilà.

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> Tous les humains sont faillibles..., 19 juin 2001

« Le net n’est certes pour rien dans la création de ces
mouvements et leur développement. »

C’est tout à fait exact, et je comprends que tu dénonces
l’amalgame. Mais tu n’offres aucune réponse aux attentes
sociales qui elles n’ont plus n’ont pas changé à cause du
réseau.

Sans proposition issue de la réflexion sociale, c’est la
justice qui tranchera tous les débats, au fur et à mesure
que la population croissante du réseau s’inventera
des préjudices, dépassant en imagination parallélisée toute
réflexion dogmatique.

J’avoue personellement préférer que l’initiative vienne de
ceux que tu dénonces que des marchands de yahourt. Ceci
n’engage évidemment que moi, et n’est qu’un pis-aller
à défaut d’une réflexion, de laquelle on ne peut exclure
personne si on veut qu’elle soit honnête.

On peut certes préférer faire de la politique.

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> > Tous les humains sont faillibles..., 25 juin 2001

C’est loin de la critique première des actions de l’AIPJ, qui reposait avant tout sur la volonté de celle-ci de voir les opérateurs techniques effectuer spontanément un travail de police hors de toute investigation judiciaire.

En effet, c’est bien là la seule véritable question. S’il devait advenir que les intermédiaires techniques se voient attribuer une quelconque responsabilité envers les contenus éditoriaux des sites qu’il hébergent et se voient par voient condamnés parce que refusant de jouer aux policiers, je propose que soient poursuivies les sociétés autoroutières, les compagnies aériennes, les transports maritimes, etc... dès lors qu’aura été constaté qu’un véhicule, un avion ou un navire aura servi au transport d’un matériel illicite.

Vous trouvez ça idiot ? Moi aussi.

Jacques

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