Un moustique agé de trois heures traverse la rue sans ses parents. L’impact avec l’antivent de mon autoroul lui fait gicler ses tripes. Je balance un puissant jet de Texvitre sur la surface transparente pour achever de le désintégrer. Je couic le Jingeule en train de jingueuler dans ma radio. Convoqué que je suis à un palabre avec le Caïd de Babelouèbe. Pas moins. Le Mastar des Télécoms, en chair et en os. Pour bien palper de la catagonie ambiante et voir comment les Forces Babelouèbiennes pourraient arranger les chronomodulateurs de la C.O.M. Et leur papier à en-tête dans la foulée. Rencontre directe organisée par mon Bigchief à oimbibi. Passer de spector d’invesdivagation à rebouteux spécialisé, tu parles d’une évolution de carrière. Je roule dans la Zone Taxépro en périphérie du Bled. Total déserte, vu l’heure nuitale. Les Fabricohangars et les MégaMall s’enfilent comme les phones.
J’arrive à mon point de rendez-vous. Le GigaConsoMarket. Enfin les bureaux du Bulldingue du dessus. Pour une fois, je trouve une place à l’aise sur le GartaKaiss vide. Stupido, j’allais foutre dix boules dans le Kadacourses. Ah y sont balèzes les lobotomarketeurs. Des panneaux de propagande rétroéclairés aux couleurs hurlantes vantent le nouveaudor webcamé qui met en transe tous les enfants de potins. Cracra Loft, l’animatrice siliconée aux flingomatiks
chromés présente la nouvelle populémission : Bunker Blues. 11 au départ. 1 à l’arrivée. Et pour les autres un contrat marketing dans la tête. Je remonte le col de mon blouz et accélère la foulée sous la pluviote vers les Portamatiks. Je zieute le haut de l’immeuble perdu dans la brume orageuse. Une faible lumière verte éclaire une fenêtre. J’arrive sur le digiphone près de la porte. Je crache mon ADN sur la petite plaque située sous le pavé numérique. Identifié que je suis, les portamatiks grincent dans leurs rails.
Un jeune technodesurf, en train de laver le plafond, expose son tshirt ironigolo. Le corps de la blondasse de Bunker Blues allongée en maillot. Egorgée. Sanguinolente. Le texte qui l’accompagne en gras s’étale sur son poitrail : Oh mon dieu ils ont tué Joana !!
J’avance jusqu’au vigilant derrière son comptoir. Il est en train de mater une Strimvideo sur le réseau. Je zieute. Un Filmo3D à caractère libidineux. Tiens on dirait « Oh oui, prend-moi le trou de sécurité » de Darc Porcel. Je toussote pour marquer ma présence. L’érotomane dresse aussi la tête. J’indique l’objet de ma venue. Il me refourgue un magnétobadge « De passage » à me punaiser sur le poitrail et fait un geste agacé en direction d’un écriteau pour m’indiquer
le bureau où le Caïd m’attend. Et il se rescotche à son écran de peur de perdre le fil de l’histoire. Je souris à la caméra pas cachée et me dirige vers le MontaKabin.
« ACHESS », c’est imprimé sur un panneau jaune scotché sur les portamatiks. Je me maintiens en forme en me tapant les escalapieds. Une fois arrivé sur le bon palier, je repère le burlingue du Caïd grâce au ControlZéd devant la porte. J’avance jusqu’au gaillard taillé dans la masse. Un factotum effaceur d’embrouille. Je lui montre mon magnétobadge et ma plaque professionnelle. Il dit qu’il veut ma ViraleCard. Je lui tend et il la met dans son lecteur pour vérification. Un exemplaire chiffonné de V7Patch traîne sur la tablette d’attente. Sur la couverture : « BUNKER BLUES. Notre interviou-exclu, les gardiens de la psykozmachine affirment : Tout cet observatisme, c’est vraiment degpapoli ! (pages 10-45) » Je lui explique la raison de ma venue. Il fait semblant de comprendre et m’ouvre le bureau. J’entre tandis que le malabar referme la porte dans mon dos. Des stores à lamelles masquent les baies vitrées et filtrent la lumière embrumée de poussiére dans la pièce sombre et vide. De la porte loin devant moi où filtre la lumière verte, j’entend un râle. J’avance prudemment.
Une vision de cauchemar me saute à la face lorsque j’ouvre la porte. Le Caïd en maillot marcel, assis en tailleur sur un gigantesque lit capitonné. Les yeux révulsés, le visage déformé. Il grogne en bavant. L’atmosphére géle-burnouss lui fait fumer l’haleine. Ta mère vend du Ouap en enfet ! qui me guture en se dévissant la tête. Là, y va pas fort le mastodonte des cablopérators. Je me ressaisis et repère un autre ControlZéd derrière moi. A coté de la porte qu’il était, le gaillard sournois. Je lui dit : « Faut dire à votre patron de pas se mettre dans des états pareils. Bon c’est pas la joie pour la néoconomie mais tout de même. » L’athlète ne bouge pas un cil. Le Caïd à quatre pattes s’ébroue comme un bouledogue et claque de la baviote plein les murs.
Le Golem des techniquologies s’asseoit sur le bord du lit et reprend ses esprits. Il se lève et s’avance vers moi en s’essuyant la bouche d’une main.
Pétoire, c’est ça ? il me demande en m’en broyant cinq.
Pétrois, votre luminosité ambiante.
J’étais en pleine séance de relaxation.
De relaxation ?
Oui, comme vous le savez j’ai eu un passage à vide, ces derniers temps.
C’est la Catagonie, Pétasse. Le technomalaise. Le crépuscule des ouinners. Qui me dit l’éléphantesque en me faisant vibrer les poumons d’une claque entre les omoplates.
Et vous voulez que je vous dise à quoi ça se voit ? continue le Caïd.
C’est quand les jeunes loups s’en prennent au chef de meute. A oimbibi. L’autre jour, un jeune cave, un ouinner de VidéoGames s’en prend à moi, le Caïd.
Un ptit mec. Nerveux. Tout de suite les gros mots et tout. Y dit que c’est moi qui l’ai foutu dans la panade. Moi, le Caïd. C’est à moi qui parlait, le jeune blanc-bec. Bordchit ! Y a plus de respect. Mais qu’ils crèvent ! Qu’ils crèvent tous !
Un bibelodécor achéve son existence de bibelodécor sous le poing-marteau du Titan des Télétransmissions. Pour détendre l’atmosphére, je dis :
Allons, Allons. Vous conservez une dette de jeune ouinner de la belle époque. Ca vous garde le teint frais. Pour la techniquologie, l’armurier et le bétonneur vous chatouille à peine les arpions. Ropaweb retourne chez sa mère et question Uèmtééss, y a pu que vous et Vivenzavi dans la place.
Justement, ça fait un de trop ! Aboit le Mastar en se rhabillant.
N’empêche, je rajoute : vous êtes le Cador des VélossConnectors à Babelouèbe. Et pis, question propagande, pardon. Avec votre turbine à trouvailles électroniques, vous êtes le BigOne à sponsorer Bunker Blues. Ca c’est de l’hyperplan de lobotomarketeurs.
Le Colosse des fils à communiquer dedans oblique le menton pour mieux se serrer le kiki à coup de cravate et dit :
Je suis joyce que vous abordiez ce point. Justement à ce sujet, mes TechnoConsults m’ont proposé des réunions de DéontoCode. Rapport au respect du client, enfin des clowneries dans le genre. On à le respect du client à la C.O.M.
Oui, enfin vous avez le respect de votre image de marque, quoi. Je ne suis pas convaincu que « client » veuille vraiment dire kekchose pour vous, votre sérénité diffuse.
Silence.
Votre supérieur est un comique, il m’envoie un déviant pour palabrer néoconomie.
Oui, c’est vrai, y en a qui ont pu constater l’effet déviant sur mon organisme. Je peux pas m’empêcher de rajouter.
Le Caïd fait un mouvement de tête. Ca craque. Il me fixe d’un regard sombre et soupire de nervement. Il fait un geste à l’attention de son nervi télécommandé qui s’avance vers moi aussi souriant qu’un métastase. Je déglutis en espérant arriver en bas par les escaliers. Dans l’autre piéce, une voix d’enfant qui crie : Ta soeur en slip sur les ouèbecams de la psykozmachine !!
[Suite au prochain épisode]