Note juridique du Réseau Voltaire du 18 avril :

« 

Le droit des marques et la liberté d’expression

En 1998, la Société Elf-Aquitaine, qui souhaitait museler le collectif « Elf
ne fera pas la loi en Afrique », a engagé une procédure judiciaire en se
fondant sur le droit des marques. Elle s’articulait autour de deux demandes :

1. Interdire au collectif de faire usage de la marque verbale « Elf » pour
désigner leur mouvement.

2. Interdire de reproduire la marque semi-figurative « Elf » sur les
documents du collectif.

En référé

Le juge des référés (TGI de Paris, 15 mai 1998) a conclu que la liberté
d’expression, garantie par la Constitution et consacrée par la Convention
européenne des Droits de l’homme, était supérieure au droit économique et que
seul le juge du fond pouvait être compétent sur un tel litige.

Au fond

La Cour d’appel de Paris (16 juin 1998) a conclu que :

1. L’usage de la marque verbale dans le nom du collectif ne constituait pas
une « appropriation manifestement illicite de la dénomination de ladite
société ».

2. La seule reproduction de la marque semi-figurative « Elf » sur les
documents litigieux ne suffit pas à caractériser « ni le trouble
manifestement illicite, ni le dommage imminent ».

Les prétentions de Danone face au site « jeboycottedanone.com » portent
exactement sur les mêmes demandes et sont donc vouées à l’échec, aussi bien
en référé qu’au fond, dès lors que les défendeurs font valoir la supériorité
de la liberté d’expression sur le droit économique.

Nota Bene.

Les sociétés commerciales peuvent exciper d’un autre argument : celui de
l’appel au boycottage. Mais celui-ci n’est illicite que s’il a pour but de
nuire à la société au profit d’un concurrent ou dans un but discriminatoire.
Dans le cas de jeboycottedanone.com, il est assimilable au droit de grève,
lequel est lui aussi supérieur au droit économique. »

(fin de la citation du Réseau Voltaire, NDLR)

Conclusion : a priori, Danone a toutes les chances de perdre
le procès entièrement. Si le tribunal devait lui donner raison
(même avec une amende du type franc symbolique), cela
voudrait dire que des arguments autres que juridiques auront
été mêlés à l’affaire...