Mon propos n’avait rien à voir avec une " diatribe anti-profit ". Il était de dire avec quelque provocation : ne tentons pas de mêler une logique de profit, qui peut être au demeurant légitime (et qui est celle de Napster, de Vivendi Universal ou même d’un label indépendant que je chéris comme Ninja Tune), avec une logique de diffusion du patrimoine musical, d’échange de musique gratuite voire d’éducation à la musique… Sachant que je propose que cette logique s’incarne en une seule et même entité virtuelle que je qualifie de " service public " afin de faire image et donner des clés compréhensibles à tous.
Qui sait ? La SACEM pourrait se muter en cette entité ? Sur le principe, ce serait envisageable, car l’institution défend a priori des intérêts publics. Après tout, les droits d’auteur ont été imaginés il y a quelques siècles pour protéger le patrimoine culturel de l’humanité plus encore que pour permettre aux auteurs de vivre de leur art (je vous mets en lien un texte d’Anne Latournerie sur ce pan d’histoire). Mais ne rêvons pas.
La SACEM a d’abord un rôle de flic sinon de procureur. Dernier exemple en date : l’affaire de Stéphane C., ce jeune homme de 26 ans condamné à 4 mois de prison avec sursis et 20.000 francs d’amende pour un site proposant des liens vers des sites proposant eux-mêmes des titres en mp3 de Madonna, de Pascal Obispo, de Lou Bega, etc. À l’origine de la condamnation de ce jeune homme qui gagne moins de 6000 balles par mois, on trouve qui ? La SCPP, émanation de la SACEM (cf l’article du site de Transfert en lien ci-dessous lui aussi). Quand vous leur parlez éthique ou justice, les gens de la SACEM répondent droit et règlements.
De plus, contrairement à ce que l’on croit, la SACEM a un rôle de redistribution très mineur, en tout cas bien moindre que celui de notre impôt sur le revenu. Ainsi y a-t-il une taxe sur les cassettes enregistrable qui va en partie à la SACEM. Où va l’argent ? En majorité à ceux qui vendent déjà le plus de disques. Les Sardou et les Madonna. Comme par hasard, à la nuance près d’exceptions remarquables comme U2, ce sont les plus virulents contre Napster. La SACEM redistribue donc au prorata des diffusions et des ventes, et ne cherche qu’à la marge (et encore) à aider la création au sens large, les jeunes auteurs, à faire connaître le patrimoine musical… Le fric va au fric. Basta.
De fait, aujourd’hui, très peu d’artistes vivent de leur art. Je parle d’artistes, pas de produits marketing comme les All Saints ou les boys bands. Et lorsqu’ils en vivent, ces artistes, cela passe essentiellement par d’autres voies que la SACEM dont les sous ne vont qu’à une minorité d’élus. Non, ces artistes vivent de concerts pour beaucoup, du travail de DJ pour les gens de hip hop et surtout de techno, de musiques de films (cinéma, pub, etc) pour pas mal de jazzmen (Jan Garbarek par exemple) ou d’artistes de musiques nouvelles (François Elie Roulin et bien d’autres), etc. Certains musiciens reconnus comme Richard Pinhas vouent d’ailleurs au gémonies la SACEM (tiens, un autre lien ci-dessous)…
Alors, oui, je suis pour que les artistes puissent trouver rémunération. Mais pour les artistes que j’aime, cela passe d’abord par un accès de tous à ces musiques moins évidentes, par une diffusion, une éducation même. Pour que les gens écoutent. Et les internautes veulent écouter de tout.
Ma proposition de " service public " iconoclaste ne nie pas la question de la rémunération, mais place en préalable la musique et l’accès à la culture. Je propose même une taxe sur le CD vierge qui serait, cette fois, vraiment redistribuée de façon équitable à tous les créateurs et qui pourrait aider au financement de ce service.
On pourrait également imaginer que ce service ne propose aucune nouveauté avant 3 mois de mise en vente, sans parler des différences de qualité entre enregistrements…
Sur le fond, nous ne sommes pas en désaccord. Je suis juste très pessimiste sur la capacité d’écoute de la SACEM et de ses chiens de garde. Et je pense que si les artistes pouvaient faire le boulot de la SACEM en se passant d’elle (ce que la technologie va permettre), ce serait mieux. Sans parler des majors : il suffit d’écouter Pascal Nègre crier qu’il poursuivra jusqu’à l’enfer Napster pour avoir " son pognon ", même après l’accord avec Bertelsmann pour être pessimiste…
Non, je persiste et signe : seule une logique mêlant le " copyleft ", la philosophie du " logiciel libre " et celle de la bibliothèque de prêt gratuit peut répondre à l’enjeu de la musique en ligne, sans pour autant interdire par ailleurs des logiques de ventes. Mais le chantier reste à lancer, je vous l’accorde.
Romain,
Mon propos n’avait rien à voir avec une " diatribe anti-profit ". Il était de dire avec quelque provocation : ne tentons pas de mêler une logique de profit, qui peut être au demeurant légitime (et qui est celle de Napster, de Vivendi Universal ou même d’un label indépendant que je chéris comme Ninja Tune), avec une logique de diffusion du patrimoine musical, d’échange de musique gratuite voire d’éducation à la musique… Sachant que je propose que cette logique s’incarne en une seule et même entité virtuelle que je qualifie de " service public " afin de faire image et donner des clés compréhensibles à tous.
Qui sait ? La SACEM pourrait se muter en cette entité ? Sur le principe, ce serait envisageable, car l’institution défend a priori des intérêts publics. Après tout, les droits d’auteur ont été imaginés il y a quelques siècles pour protéger le patrimoine culturel de l’humanité plus encore que pour permettre aux auteurs de vivre de leur art (je vous mets en lien un texte d’Anne Latournerie sur ce pan d’histoire). Mais ne rêvons pas.
La SACEM a d’abord un rôle de flic sinon de procureur. Dernier exemple en date : l’affaire de Stéphane C., ce jeune homme de 26 ans condamné à 4 mois de prison avec sursis et 20.000 francs d’amende pour un site proposant des liens vers des sites proposant eux-mêmes des titres en mp3 de Madonna, de Pascal Obispo, de Lou Bega, etc. À l’origine de la condamnation de ce jeune homme qui gagne moins de 6000 balles par mois, on trouve qui ? La SCPP, émanation de la SACEM (cf l’article du site de Transfert en lien ci-dessous lui aussi). Quand vous leur parlez éthique ou justice, les gens de la SACEM répondent droit et règlements.
De plus, contrairement à ce que l’on croit, la SACEM a un rôle de redistribution très mineur, en tout cas bien moindre que celui de notre impôt sur le revenu. Ainsi y a-t-il une taxe sur les cassettes enregistrable qui va en partie à la SACEM. Où va l’argent ? En majorité à ceux qui vendent déjà le plus de disques. Les Sardou et les Madonna. Comme par hasard, à la nuance près d’exceptions remarquables comme U2, ce sont les plus virulents contre Napster. La SACEM redistribue donc au prorata des diffusions et des ventes, et ne cherche qu’à la marge (et encore) à aider la création au sens large, les jeunes auteurs, à faire connaître le patrimoine musical… Le fric va au fric. Basta.
De fait, aujourd’hui, très peu d’artistes vivent de leur art. Je parle d’artistes, pas de produits marketing comme les All Saints ou les boys bands. Et lorsqu’ils en vivent, ces artistes, cela passe essentiellement par d’autres voies que la SACEM dont les sous ne vont qu’à une minorité d’élus. Non, ces artistes vivent de concerts pour beaucoup, du travail de DJ pour les gens de hip hop et surtout de techno, de musiques de films (cinéma, pub, etc) pour pas mal de jazzmen (Jan Garbarek par exemple) ou d’artistes de musiques nouvelles (François Elie Roulin et bien d’autres), etc. Certains musiciens reconnus comme Richard Pinhas vouent d’ailleurs au gémonies la SACEM (tiens, un autre lien ci-dessous)…
Alors, oui, je suis pour que les artistes puissent trouver rémunération. Mais pour les artistes que j’aime, cela passe d’abord par un accès de tous à ces musiques moins évidentes, par une diffusion, une éducation même. Pour que les gens écoutent. Et les internautes veulent écouter de tout.
Ma proposition de " service public " iconoclaste ne nie pas la question de la rémunération, mais place en préalable la musique et l’accès à la culture. Je propose même une taxe sur le CD vierge qui serait, cette fois, vraiment redistribuée de façon équitable à tous les créateurs et qui pourrait aider au financement de ce service.
On pourrait également imaginer que ce service ne propose aucune nouveauté avant 3 mois de mise en vente, sans parler des différences de qualité entre enregistrements…
Sur le fond, nous ne sommes pas en désaccord. Je suis juste très pessimiste sur la capacité d’écoute de la SACEM et de ses chiens de garde. Et je pense que si les artistes pouvaient faire le boulot de la SACEM en se passant d’elle (ce que la technologie va permettre), ce serait mieux. Sans parler des majors : il suffit d’écouter Pascal Nègre crier qu’il poursuivra jusqu’à l’enfer Napster pour avoir " son pognon ", même après l’accord avec Bertelsmann pour être pessimiste…
Non, je persiste et signe : seule une logique mêlant le " copyleft ", la philosophie du " logiciel libre " et celle de la bibliothèque de prêt gratuit peut répondre à l’enjeu de la musique en ligne, sans pour autant interdire par ailleurs des logiques de ventes. Mais le chantier reste à lancer, je vous l’accorde.
PS :
Pour Anne Latournerie (histoire du droit d’auteur) :
http://www.powow.net/fr/culture/article.cfm?id=563&nivo=3&srub=1
Pour accéder aux propos de Pinhas : http://www.powow.net/fr/dossiers/accords/index.htm
Voir en ligne : Un jeune homme de 26 ans condamné par la SACEM (Transfert)