10 octobre 2003, 12:15, par un éditeur indépendant
-Non seulement la littérature ne représente qu’une activité très minoritaire du secteur du livre (secteur entier qui profite des mesures de prix unique, de taxation des photocopies, de la réduction de la TVA au détriment des autres produits sur laquelle la TVA n’est pas baissée...)
Pour info, répartition de l’offre éditoriale en pourcentage du CA total de l’édition : littérature (18,9 %), pratique (14,71 %), encyclopédies et dictionnaires (11,35 %), scolaire (10,92 %), jeunesse (9,32 %), secteur scientifique et technique (5,43 %), droit et sciences éco (5,35 %), sciences humaines et sociales (5,13 %), l’art (5,02 %), la BD (4,14 %), le parascolaire (3,99 %), l’actualité (2,55 %), la religion (1,93 %), les ouvrages de documentation (0,89 %), l’ésotérisme (0,42 %)
- Au passage, vous avez dû mal lire : nous n’appelons pas à la mort du livre (nous en consommons personnellement un certain nombre), nous mettons en avant un certain nombre d’arguments qui sont systématiquement occultés (toujours dans le but de nous taxer des sous, à nous lecteurs-contribuables)
Excusez-moi, mais ce discours est un peu poujadiste. Il n’y a pas d’un côté les lecteurs-cochons-de-payants et les éditeurs-profiteurs.
C’est plus complexe. Un exemple de cette complexité : le débat sur les bilbilothèques et le prêt gratuit. Les bibliothèques permettent d’acheter des livres qui font vivre les éditeurs et les auteurs, tout en assurant un pluralisme et un accès égalitaire à la culture. Et un accès vraiment démocratique, puisqu’on a pas besoin d’un ordinateur et d’une connexion ADSL pour en bénéficier. Il est possible de défendre un projet collectif d’accès la culture.
Comme vous le savez sans doute, certains auteurs ont pris position contre le prêt gratuit. C’est purement scandaleux.
- J’ai l’impression que vous essayez d’introduire dans notre article une distinction entre une industrie cynique et des petits producteurs de bons petits produits qui aiment le métier. Pourquoi pas. Sauf que l’équation, pour l’auteur, est relativement la même. Ensuite, que le correcteur, le maquettiste, le graphiste et la secrétaire de rédaction soient passionnés par leur travail, ça n’est pas le propos (même si c’est tant mieux).
Les relations entre un petit éditeur et un auteur ne sont absolument pas les mêmes que celles qui unissent Gallimard, par exemple, à un jeune auteur débutant, ou que celles qui unissent Gallimard à un auteur de best-seller, ou que celles qui unissent un petit éditeur à un auteur de best-seller, etc.
Au risque de vous choquer, l’auteur n’est pas seul responsable du succès ou de l’insuccès d’un livre. De la même façon qu’un réalisateur n’est pas seul responsable du sort fait à son film. tout dépend aussi du format, de la qualité de l’image, du canal de distribution, de la passion que chacun aura apporté à la réalisation.
C’est plutôt une bonne chose. Travailler collectivement à la création d’une oeuvre, quoi de plus magnifique ?
- le libraire gagne, sur chaque livre, quatre fois plus que l’auteur.
Beaucoup de libraires gagnent le SMIC. Il n’est pas exagéré de dire que, dans de nombreux cas, seule leur passion les fait tenir, leur passion pour... les auteurs et les livres. S’ils voulaient gagner de l’argent...
- Par ailleurs, publier un livre en même temps dans les librairies et sur Internet, en téléchargement, à un prix plus faible, se heurte au prix unique du livre.
Remarque pertinente. Mais en quoi cela protège-t-il la « création » elle-même ? Sauf à confondre, selon le discours qui va bien, le circuit de distribution de l’édition et les ultra-minoritaires auteurs de littérature ?
Le prix unique protège la création parce qu’il bénéficie, essentiellement, aux maillons les plus faibles de la chaîne : les éditeurs et les librairies qui n’ont pas les moyens de consentir un rabais de 10 ou 20 % sur un livre sans mettre la clé sous la porte. Supprimer le prix unique du livre, c’est se condamner à n’acheter à la FNAC que des livres édités par Hachette. Autant dire que, dans ces conditions, le statut de l’auteur, la diversité, le pluralisme...
- Je signale au passage qu’on peut tout de même imaginer des éditeurs passionnés travaillant en ligne, avec les auteurs qui le désirent, avec les lecteurs qui en ont besoin, etc.
Oui, mais on retombe dans les mêmes schémas : ce sont des salaires à payer, des charges, des frais...
- on peut aussi bien prétendre que les auteurs peuvent se regrouper pour s’entraider, ce qui revient à recréer une structure éditoriale propre à aider certains d’entre eux ou promouvoir la création...
Oui, sauf qu’il existe quand même un frein culturel et psychologique important : l’autopublication est très bien considérée sur Internet, mais ce n’est pas le cas dans l’édition papier. C’est d’ailleurs très injuste. Plutôt que de poser l’équation en des termes économiques (les petits contre les gros), vous devriez plutôt poser cela en terme de diversité et de liberté : face à l’industrialisation et à l’uniformisation de l’offre, l’autopublication ne représente-t-elle pas une forme d’alternative (ou de complément) ? Tout ne se réduit pas à une question d’argent, et surtout pas la culture.
-Non seulement la littérature ne représente qu’une activité très minoritaire du secteur du livre (secteur entier qui profite des mesures de prix unique, de taxation des photocopies, de la réduction de la TVA au détriment des autres produits sur laquelle la TVA n’est pas baissée...)
Pour info, répartition de l’offre éditoriale en pourcentage du CA total de l’édition : littérature (18,9 %), pratique (14,71 %), encyclopédies et dictionnaires (11,35 %), scolaire (10,92 %), jeunesse (9,32 %), secteur scientifique et technique (5,43 %), droit et sciences éco (5,35 %), sciences humaines et sociales (5,13 %), l’art (5,02 %), la BD (4,14 %), le parascolaire (3,99 %), l’actualité (2,55 %), la religion (1,93 %), les ouvrages de documentation (0,89 %), l’ésotérisme (0,42 %)
- Au passage, vous avez dû mal lire : nous n’appelons pas à la mort du livre (nous en consommons personnellement un certain nombre), nous mettons en avant un certain nombre d’arguments qui sont systématiquement occultés (toujours dans le but de nous taxer des sous, à nous lecteurs-contribuables)
Excusez-moi, mais ce discours est un peu poujadiste. Il n’y a pas d’un côté les lecteurs-cochons-de-payants et les éditeurs-profiteurs.
C’est plus complexe. Un exemple de cette complexité : le débat sur les bilbilothèques et le prêt gratuit. Les bibliothèques permettent d’acheter des livres qui font vivre les éditeurs et les auteurs, tout en assurant un pluralisme et un accès égalitaire à la culture. Et un accès vraiment démocratique, puisqu’on a pas besoin d’un ordinateur et d’une connexion ADSL pour en bénéficier. Il est possible de défendre un projet collectif d’accès la culture.
Comme vous le savez sans doute, certains auteurs ont pris position contre le prêt gratuit. C’est purement scandaleux.
- J’ai l’impression que vous essayez d’introduire dans notre article une distinction entre une industrie cynique et des petits producteurs de bons petits produits qui aiment le métier. Pourquoi pas. Sauf que l’équation, pour l’auteur, est relativement la même. Ensuite, que le correcteur, le maquettiste, le graphiste et la secrétaire de rédaction soient passionnés par leur travail, ça n’est pas le propos (même si c’est tant mieux).
Les relations entre un petit éditeur et un auteur ne sont absolument pas les mêmes que celles qui unissent Gallimard, par exemple, à un jeune auteur débutant, ou que celles qui unissent Gallimard à un auteur de best-seller, ou que celles qui unissent un petit éditeur à un auteur de best-seller, etc.
Au risque de vous choquer, l’auteur n’est pas seul responsable du succès ou de l’insuccès d’un livre. De la même façon qu’un réalisateur n’est pas seul responsable du sort fait à son film. tout dépend aussi du format, de la qualité de l’image, du canal de distribution, de la passion que chacun aura apporté à la réalisation.
C’est plutôt une bonne chose. Travailler collectivement à la création d’une oeuvre, quoi de plus magnifique ?
- le libraire gagne, sur chaque livre, quatre fois plus que l’auteur.
Beaucoup de libraires gagnent le SMIC. Il n’est pas exagéré de dire que, dans de nombreux cas, seule leur passion les fait tenir, leur passion pour... les auteurs et les livres. S’ils voulaient gagner de l’argent...
- Par ailleurs, publier un livre en même temps dans les librairies et sur Internet, en téléchargement, à un prix plus faible, se heurte au prix unique du livre.
Remarque pertinente. Mais en quoi cela protège-t-il la « création » elle-même ? Sauf à confondre, selon le discours qui va bien, le circuit de distribution de l’édition et les ultra-minoritaires auteurs de littérature ?
Le prix unique protège la création parce qu’il bénéficie, essentiellement, aux maillons les plus faibles de la chaîne : les éditeurs et les librairies qui n’ont pas les moyens de consentir un rabais de 10 ou 20 % sur un livre sans mettre la clé sous la porte. Supprimer le prix unique du livre, c’est se condamner à n’acheter à la FNAC que des livres édités par Hachette. Autant dire que, dans ces conditions, le statut de l’auteur, la diversité, le pluralisme...
- Je signale au passage qu’on peut tout de même imaginer des éditeurs passionnés travaillant en ligne, avec les auteurs qui le désirent, avec les lecteurs qui en ont besoin, etc.
Oui, mais on retombe dans les mêmes schémas : ce sont des salaires à payer, des charges, des frais...
- on peut aussi bien prétendre que les auteurs peuvent se regrouper pour s’entraider, ce qui revient à recréer une structure éditoriale propre à aider certains d’entre eux ou promouvoir la création...
Oui, sauf qu’il existe quand même un frein culturel et psychologique important : l’autopublication est très bien considérée sur Internet, mais ce n’est pas le cas dans l’édition papier. C’est d’ailleurs très injuste. Plutôt que de poser l’équation en des termes économiques (les petits contre les gros), vous devriez plutôt poser cela en terme de diversité et de liberté : face à l’industrialisation et à l’uniformisation de l’offre, l’autopublication ne représente-t-elle pas une forme d’alternative (ou de complément) ? Tout ne se réduit pas à une question d’argent, et surtout pas la culture.