Je complète néanmoins un peu, car n’ayant point lu Laws of form, je ne peux malheureusement rien en dire ;)
Boole dans ses lois de la pensée transfère, en quelque sorte les opérations algébriques sur des nombres vers les opérations fondamentales de la pensée
Oui, il va utiliser un langage symbolique, celui de l’algèbre, pour noter les opérations de l’esprit et montrer que les signes de l’algèbre jusqu’ici appliqués aux nombres peuvent être appliqués à des classes d’objets :
« Proposition I. Toutes les opérations du langage en tant qu’instrument du raisonnement se peuvent conduire dans un système de signes composés des éléments suivants
1) Des symboles littéraux tels que x, y, etc. représentant les choses en tant qu’objets de nos conceptions.
2) Des signes d’opération tels que +,-,x, qui traduisent les opérations de l’esprit par lesquelles les conceptions des choses sont combinées ou séparées de manière à former de nouvelles conceptions comprenant les mêmes éléments.
3)Le signe d’identité =. » (Les lois de la pensée, Paris, Vrin, 1992, p.45.)
Formaliser un énoncé du langage naturel comme (1) : "le chat que je regarde mange la souris", est assez ardu, mine de rien. Quelle est le forme logique de la phrase ? On aurait l’affirmative universelle ("tous les chats sont des branleurs"), ce serait plus simple (y=vx).
Il faut le paraphraser sous la forme Sujet-copule-Prédicat afin que cela rentre dans le modèle de la syllogistique aristotélicienne avec ses quatres propositions fondamentales (l’affirmative universelle, négative universelle, affirmative particulière, négative particulière), et sans doute l’interpréter par la suite comme intersection ensembliste de classes (Boole-Schröder).
Ainsi, "le chat que je regarde mange la souris" = "le chat est regardé par moi et le chat est mangeant la souris". On peut paraphraser ainsi : "le x qui est regardé par moi est un chat, le x est mangeant la souris, et x=x".
Si l’on coupe (1) en deux propositions : "quelque chat est regardé par moi" vX=Y, et "quelque chat est mangeant une souris", vX=S.
On pourrait tenter la formulation suivante : soient x "les choses regardées par moi", y "les chats", w "les souris", z "choses mangées par les chats" . La classe des choses qui sont regardées par moi et qui sont des chats = x*y, la classe des choses mangées par les chats et qui sont des souris = w*z, d’où la classe des choses qui sont regardées par moi et qui sont des chats et la classe des choses qui sont mangées par le chat et qui sont des souris : x*y + w*z. Quel événement ! :)
En fait c’est plus compliqué, puisque Boole identifie un énoncé à la classe des instants pendant lesquels cet énoncé est vrai (passage des primary propositions qui portent sur les termes et les secondary propositions qui portent sur les énoncés propositionnels).
L’autre problème bien entendu est que si je vois le chat manger la souris, je vois aussi la souris, mais on peut faire une distinction entre regardée et vue, histoire de :))
Plus sérieusement, en quittant Boole, grâce à la logique des prédicats (à plusieurs places) et la quantification, c’est beaucoup plus simple à formaliser. Posons les prédicats : R = "être regardé par", S = "être une souris", C = "être un chat", M = "être mangé par", constante individuelle m = moi,
Il existe au moins un x, il existe au moins un y tels que C(x) S(y) et R(x,m) et M (y,x).
ne répéte-ton pas une même chose en affirmant un égalité de cette sorte : dire que 3 + 2 est l’équivalent de 5 ?
C’est une grosse question ! (Et le principe du calcul, la substitution de l’identique salva veritate...).
Bon, on va reparler de Kant un tout petit peu (histoire de coller à l’article), pour lui c’est un jugement synthétique a priori (un jugement scientifique, et toute la Critique de la raison pure traite du problème : comment des jugements synthétiques a priori sont-ils possibles ?).
La distinction analytique / synthétique est l’objet du paragraphe IV de l’introduction, en gros la forme des jugements est "S est P", lorsque le prédicat P est contenu dans le sujet S, il s’agit d’un jugement analytique, quand P n’est pas déjà contenu dans S c’est synthétique. La proposition arithmétique 7+5=12 est synthétique a priori pour Kant, quand je pense "12", je ne pense pas la somme de 7 et 5, et pourtant je vais produire l’égalité a priori (indépendamment de l’expérience), ce qui accroît la connaissance, c’est magnifique ! :)
La question est alors de savoir ce qui permet d’établir cette égalité entre les deux expressions, (et surtout qu’est-ce qu’un nombre ?). Les russelliens et les bourbakistes vont rire, mais ce n’est pas grave, voir Frege, Fondement de l’arithmétique (1,3) (Paris, Seuil, 1969) où tu trouveras une réponse à la question et une critique de Kant. (lire également du même « Sens et dénotation », in Ecrits logiques et philosophiques, Paris, Seuil, 1971, et puisqu’on en parlait : « La logique calculatoire de Boole et l’idéographie », « le langage formulaire logique de Boole et mon idéographie », in Ecrits posthumes, Nîmes, Chambon, 1994).
Je complète néanmoins un peu, car n’ayant point lu Laws of form, je ne peux malheureusement rien en dire ;)
Boole dans ses lois de la pensée transfère, en quelque sorte les opérations algébriques sur des nombres vers les opérations fondamentales de la pensée
Oui, il va utiliser un langage symbolique, celui de l’algèbre, pour noter les opérations de l’esprit et montrer que les signes de l’algèbre jusqu’ici appliqués aux nombres peuvent être appliqués à des classes d’objets :
« Proposition I. Toutes les opérations du langage en tant qu’instrument du raisonnement se peuvent conduire dans un système de signes composés des éléments suivants
1) Des symboles littéraux tels que x, y, etc. représentant les choses en tant qu’objets de nos conceptions.
2) Des signes d’opération tels que +,-,x, qui traduisent les opérations de l’esprit par lesquelles les conceptions des choses sont combinées ou séparées de manière à former de nouvelles conceptions comprenant les mêmes éléments.
3)Le signe d’identité =. » (Les lois de la pensée, Paris, Vrin, 1992, p.45.)
Formaliser un énoncé du langage naturel comme (1) : "le chat que je regarde mange la souris", est assez ardu, mine de rien. Quelle est le forme logique de la phrase ? On aurait l’affirmative universelle ("tous les chats sont des branleurs"), ce serait plus simple (y=vx).
Il faut le paraphraser sous la forme Sujet-copule-Prédicat afin que cela rentre dans le modèle de la syllogistique aristotélicienne avec ses quatres propositions fondamentales (l’affirmative universelle, négative universelle, affirmative particulière, négative particulière), et sans doute l’interpréter par la suite comme intersection ensembliste de classes (Boole-Schröder).
Ainsi, "le chat que je regarde mange la souris" = "le chat est regardé par moi et le chat est mangeant la souris". On peut paraphraser ainsi : "le x qui est regardé par moi est un chat, le x est mangeant la souris, et x=x".
Si l’on coupe (1) en deux propositions : "quelque chat est regardé par moi" vX=Y, et "quelque chat est mangeant une souris", vX=S.
On pourrait tenter la formulation suivante : soient x "les choses regardées par moi", y "les chats", w "les souris", z "choses mangées par les chats" . La classe des choses qui sont regardées par moi et qui sont des chats = x*y, la classe des choses mangées par les chats et qui sont des souris = w*z, d’où la classe des choses qui sont regardées par moi et qui sont des chats et la classe des choses qui sont mangées par le chat et qui sont des souris : x*y + w*z. Quel événement ! :)
En fait c’est plus compliqué, puisque Boole identifie un énoncé à la classe des instants pendant lesquels cet énoncé est vrai (passage des primary propositions qui portent sur les termes et les secondary propositions qui portent sur les énoncés propositionnels).
L’autre problème bien entendu est que si je vois le chat manger la souris, je vois aussi la souris, mais on peut faire une distinction entre regardée et vue, histoire de :))
Plus sérieusement, en quittant Boole, grâce à la logique des prédicats (à plusieurs places) et la quantification, c’est beaucoup plus simple à formaliser. Posons les prédicats : R = "être regardé par", S = "être une souris", C = "être un chat", M = "être mangé par", constante individuelle m = moi,
Il existe au moins un x, il existe au moins un y tels que C(x) S(y) et R(x,m) et M (y,x).
ne répéte-ton pas une même chose en affirmant un égalité de cette sorte : dire que 3 + 2 est l’équivalent de 5 ?
C’est une grosse question ! (Et le principe du calcul, la substitution de l’identique salva veritate...).
Bon, on va reparler de Kant un tout petit peu (histoire de coller à l’article), pour lui c’est un jugement synthétique a priori (un jugement scientifique, et toute la Critique de la raison pure traite du problème : comment des jugements synthétiques a priori sont-ils possibles ?).
La distinction analytique / synthétique est l’objet du paragraphe IV de l’introduction, en gros la forme des jugements est "S est P", lorsque le prédicat P est contenu dans le sujet S, il s’agit d’un jugement analytique, quand P n’est pas déjà contenu dans S c’est synthétique. La proposition arithmétique 7+5=12 est synthétique a priori pour Kant, quand je pense "12", je ne pense pas la somme de 7 et 5, et pourtant je vais produire l’égalité a priori (indépendamment de l’expérience), ce qui accroît la connaissance, c’est magnifique ! :)
La question est alors de savoir ce qui permet d’établir cette égalité entre les deux expressions, (et surtout qu’est-ce qu’un nombre ?). Les russelliens et les bourbakistes vont rire, mais ce n’est pas grave, voir Frege, Fondement de l’arithmétique (1,3) (Paris, Seuil, 1969) où tu trouveras une réponse à la question et une critique de Kant. (lire également du même « Sens et dénotation », in Ecrits logiques et philosophiques, Paris, Seuil, 1971, et puisqu’on en parlait : « La logique calculatoire de Boole et l’idéographie », « le langage formulaire logique de Boole et mon idéographie », in Ecrits posthumes, Nîmes, Chambon, 1994).